samedi 10 août 2019

Communiqué suite à la mort du maire de Signes


Communiqué du Comité du Var du POI 

« Désagrégation chez certains du sens de l’Etat et de la nation »
Mais qui désagrège ? 

Le Maire de Signes a donc surpris deux « inciviques » réalisant un « dépôt sauvage » sur un chemin communal. Qui a autorité pour faire respecter les textes en la matière ? 

Le premier texte qui aborde de manière explicite ces décharges, est la loi du 15 juillet 1975. Est stipulé que c’est « l’Agence de l’environnement et de la maîtrise de l’énergie » créée à ce moment sous maîtrise Etat, qui a en charge le suivi, la gestion, et la police de ces décharges. Texte qui a été vidé de son contenu, car, comme le dit une brochure de la DREAL (1), il « a connu une constante évolution sous la poussée conjointe des textes européens et de la demande sociétale ». Avec comme conséquence « le rôle des collectivités locales qui s’est trouvé réaffirmé tant au niveau de la gestion que de la police administrative ». 

Une vague incessante de transfert des missions de l’Etat 
vers les collectivités locales 

Comme toutes les missions publiques, celle-ci a subit la vague de transfert de l’État vers les collectivités locales… et comme pour l’État, ces collectivités se retrouvent sous le coup des mesures d’austérité. 

Ainsi, s’agissant de la « police de l’environnement », terme générique relatif à toute forme d’occupation et de gestion du sol, les agents des ex-DDE et DDAF (2), par leur présence sur le terrain, au contact proche et régulier des communes et de leurs agents communaux, étaient en mesure de connaître parfaitement toute activité qui pouvait survenir, et d’intervenir. 

Aujourd’hui encore, des agents des DREAL et des DDT (3) sont assermentés pour être en mesure d’intervenir sur ces occupations « inciviques » des espaces. 

Mais leur nombre actuel (tois ou quatre par département), rend toute intervention totalement illusoire, obligeant les maires « à faire justice par eux-mêmes ». 

La République, « un combat » ? 

Lors de la cérémonie organisée le vendredi 9 août à Signes, après une gigantesque couverture médiatique, les plus hautes autorités de l’exécutif étaient présentes, y compris le président de la République puisque c’est son message qui a été lu par la ministre des territoires Jacqueline Gourault. 

Message clair : « Ce 5 août, alors que les Français sont en vacances, le maire de Signes était dans sa ville, il défendait sa commune, il a pris le parti de s’interposer pour faire respecter la règle, le droit. La République tient debout grâce à des hommes et des femmes qui font actes de courage, et de désintéressement. C’est la République qui est orpheline aujourd’hui. La République n’est pas donnée, elle est un combat permanent. Elle tient debout grâce à des femmes et des hommes qui comme Jean-Mathieu Michel, la défendent et la servent avec courage. Je veillerai personnellement à ce que face aux incivilités et à la dégradation chez certains du sens de l’État et de la nation, la réponse soit toujours ferme, exemplaire et sans complaisance. Nous le devons à M. Michel et à tous les élus de France »

Pourquoi la République devrait-elle être « un combat » ? Pourquoi faudrait-il être « courageux » ? Contre qui ? La réponse est donnée : l’incivilité. Le Larousse écrit « Incivilité : non civique, se dit d’un citoyen sans dévouement envers la collectivité, l’Etat »

N’y aurait-il pas un lien direct entre cet « incivisme » et l’effondrement de ce qui constitue cette "collectivité", cet "Etat" ? Qui « désagrège », démantèle le tissu constitutif du "collectif, de l’Etat" ? Qui déchire le réseau du service public, cette présence territoriale, laissant ainsi ouvertes toutes les portes au « chacun pour soi » ? Tout est payant, avec des tarifs sans cesse plus élevés, y compris celui du stockage des déchets et de leurs traitements. 

Ironie de l’histoire, la veille de cette cérémonie était publié au Journal officiel la loi portant "transformation de la fonction publique" qui constitue une destruction sans précédent du statut des agents de la fonction publique. 

« Je veillerai personnellement à ce que la réponse soit toujours ferme » 

En toute logique, devant une situation de destruction des éléments constitutifs de la République, c’est-à-dire de ses services publics, Madame la ministre des territoires dit, sous la dictée de son président Macron, que la République « est un combat », qui « ne tient » que par des « actes de courage ». Elle assène aux centaines de maires rassemblés ce vendredi 9 août à Signes : « Faites comme le maire de Signes, soyez courageux, allez affronter les inciviques… car ce n’est pas les agents des services publics qui pourront le faire à votre place »

Et Macron conclut son message par une nouvelle charge répressive, menaçant tout individu "incivique", dans la plus parfaite continuité de celles qui ont tué Steve. 

Ce 9 août, malgré la sincère peine face à ce décès brutal d’un maire connu et respecté, personne n’était dupe. Plusieurs élus affirmant « les discours officiels vont bien entendu glorifier le maire de Signes, mais pas un mot sur l’absence des services publics qui fait qu’il s’est trouvé seul à faire respecter la loi ». Et du côté des nombreux journalistes, l’une confiait que « cette incroyable couverture médiatique est sans commune mesure avec les faits, certes dramatiques, mais il faut tout ce bruit pour ne pas parler du reste qui fâche ! »

Toulon, le 9 août 2019 

1  DREAL : Direction Régionale de l’Environnement, de l’Aménagement et du Logement. 
2  DDAF : Direction Départementale de l'Agriculture et de la Forêt
3  DDT : Direction Départementale des Territoires